Flâner entre le rêve et le poème… Ouvrir la cage aux arpèges… Se noyer dans un mot… S'évaporer dans les ciels d'un tableau… Prendre plaisir ou parfois en souffrir… Sentir et ressentir… Et puis le dire – S'enivrer de beauté pour se forcer à croire !
« Dis-moi quel est ton infini, je saurai le sens de ton univers, est-ce l’infini de la mer ou du ciel, est-ce l’infini de la terre profonde ou celui du bûcher ? » Dans le règne de l’imagination, l’infini est la région où l’imagination s’affirme comme imagination pure, où elle est libre et seule, vaincue et victorieuse, orgueilleuse et tremblante. Alors les images s’élancent et se perdent, elles s’élèvent et elles s’écrasent dans leur hauteur même. Alors s’impose le réalisme de l’irréalité.
…
On comprend les figures par leur transfiguration.
Gaston Bachelard – L’air et les songes – Essai sur l’imagination du mouvement
Pierre Bonnaud (1865-1930), Salomé (1890,) Musée d’Orsay
Simple silhouette fugitive du récit évangélique, éclipsée par Judith dans l’art, Salomé a attendu la fin du XIXème siècle pour se muer en un mythe universel. Dès lors objet de fascination, elle devient dans la littérature, la peinture et la musique, l’icône de la décadence fin-de-siècle, figure emblématique dans laquelle se reflètent tous les fantasmes : vierge hystérique éprise d’absolu, femme fatale vénéneuse à la perversion destructrice, incarnation de l’érotisme obsessionnel et du macabre absolu.
Beauté envoûtante de la représentation artistique du mal, Salomé est devenue l’archétype parfait de la fusion entre la séduction esthétique et l’effondrement moral, une thématique centrale de la fin du XIXème siècle.
Si de toutes les nombreuses expressions artistiques du personnage qui nous ont été jusqu’à présent offertes, il me fallait n’en retenir qu’une seule, mon choix se porterait sans hésitation sur la représentation qu’en a donnée Richard Strauss à travers son opéra éponyme de 1905 inspiré de la pièce de théâtre qu’Oscar Wilde tira de sa lecture des Évangiles de Marc et de Matthieu.
Et, partageant l’enthousiasme du musicologue Alain Duault qui présente ici brièvement et justement l’œuvre, je choisirais d’emporter sur mon île déserte – déjà bien achalandée – la version du metteur en scène Ivo van Hove (2017) enregistrée pour les cinémas U.G.C., dans laquelle la soprano suédoise Malin Byström incarne une Salomé des plus troublantes. Envoûtante !
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Danse des sept voiles
Sous les yeux ébahis de sa mère, Salomé, pour aguicher le désir de son monarque de beau-père, entreprend, sensuelle et provocatrice, sa danse érotique des ‘sept voiles’ sur une musique aphrodisiaque que Richard Strauss a composée à partir d’une savante combinaison de sonorités traditionnelles orientales et de franche modernité européenne.
Elle attend d’Hérode séduit qu’il lui offre sur un plateau d’argent la tête de Jochanaan (le prophète Jean-Baptiste) qui, retenu prisonnier au fond d’une citerne, s’est refusé à elle.
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Jochanaan exécuté
Le roi a tenu sa promesse. Scène ultime de l’opéra, Salomé, conduite au paroxysme de l’hystérie par le triomphe de sa sordide vengeance, baise goulument la bouche du prophète baignant dans son sang encore chaud.*
Frappé d’effroi, Hérode demande sa mort immédiate.
* Juste critique historique, les puristes auraient préféré que seule la tête de Jochanaan fût ici présentée à Salomé.
SALOME
Ah, ich habe deinen Mund geküßt, Jochanaan.
Ich hab' ihn geküßt, deinen Mund.
Es war ein bitterer Geschmack auf deinen Lippen.
Hat es nach Blut geschmeckt?· Nein.
Doch schmeckte es vielleicht nach Liebe.
Sie sagen, das die Liebe bitter schmecke.
Doch was, was tut's, was tut's?
Ich habe deinen Mund geküßt, Jochanaan,
Ich hab' ihn geküßt, deinen Mund.
HEROD (sich umwendend)
Man töte dieses Weib!
...
SALOMÉ
Ah, je l'ai baisée ta bouche, Jochanaan.
Je l'ai baisée, ta bouche.
Il y avait un goût âcre sur tes lèvres.
Était-ce la saveur du sang ?
Mais peut-être était-ce le piment de l’amour.
On dit que l’amour a un goût amer.
Mais qu'importe ? Qu'importe ?
J'ai baisé ta bouche, Jochanaan,
je l'ai baisée, ta bouche.
HÉRODE (se tournant vers les soldats)
Tuez cette femme !
Mon père aurait eu aujourd’hui même 115 ans. Être né un jour de fête nationale n’avait pas contribué à développer en lui le goût des armes ; il aimait la vie passionnément. Le conflit ne trouvait, d’une manière générale, aucune grâce à ses yeux. Lorsqu’il voulait éviter de sordides et inutiles discussions sur des propos par trop clivants, ou pour s’épargner quelques remarques déplaisantes qu’il aurait dû asséner à un interlocuteur trop réfractaire à la nuance, il avait coutume de mettre fin au débat, d’une manière assez abrupte certes, mais affable, par cette invitation merveilleuse qu’il envoyait à son vis-à-vis sur un ton des plus badins : « Parlez-moi d’amour ! »
Cette phrase, qui le représentait fort bien, il l’empruntait pour la circonstance au titre d’une romance très populaire du temps de sa jeunesse, dans les années 1930, qu’avait écrite Jean Lenoir et dont Lucienne Boyer, artiste très en vogue de l’entre-deux-guerres, avait fait son plus célèbre succès.
Quel gramophone, quelle platine, aussi « high-tech » soit-elle, n’a pas au moins une fois joué ce morceau depuis sa création ? Les voix ne manquent pas qui ont enregistré ce formidable titre traduit en près de quarante langues et dont la musique a autant de fois servi le cinéma ou la télévision.
On ne peut pas avoir oublié « Casablanca » de Michael Curtis avec le couple Humphrey Bogart – Ingrid Bergman, ni « Violette Nozière » de Chabrol, ni « Minuit à Paris » de Woody Allen, et autant d’autres films qui ont fait les belles heures du cinéma et qui ont d’une manière ou d’une autre fait appel à cette référence éternelle de la chanson française.
Chanson vieillotte certes – pas vraiment du rap – mais rechignerions-nous à écouter Juliette Gréco ?
Genre désuet, certes, mais résisterions-nous à la grâce et à la voix du plus pur cristal de Ingeborg Hallstein ?
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Cette minuscule anthologie-souvenir pour introduire une série de billets à venir dont l’unique mission sera de « parler d’amour »… Un peu plus directement peut-être que ne l’auront fait les centaines de leurs prédécesseurs sur ces pages, mais toujours au travers de la sensibilité des experts du thème : les artistes.
Ne serait-ce pas le moins que puisse faire un ancêtre, en souvenir d’un ancêtre, par ces temps difficiles où le mot « GUERRE », que l’on imaginait réservé aux seuls livres d’histoire choisit d’occuper tout l’espace de la jeunesse ?
Lamartine – La chute d’un ange – XII vision (1838)
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Francisco Luis Bernardez (Argentine 1900-1978)
« Être amoureux… »
Être amoureux, mes amis, c’est trouver le nom exact de la vie. C’est tomber enfin sur le mot qu’il faut pour affronter la mort. C’est retrouver la clé cachée qui ouvre la prison ou l’âme est retenue captive. C’est respirer le vent du large qu’on respire au-delà de la chair. C’est contempler du haut de la personne la raison des blessures. C’est déceler dans des yeux un regard vrai qui nous regarde. C’est écouter dans une bouche sa propre voix profondément répétée. C’est surprendre dans des mains cette chaleur de la parfaite alliance. C’est pressentir que, pour toujours, la solitude de notre ombre est vaincue.
Être amoureux, mes amis, c’est découvrir ou s’unissent corps et âmes. C’est deviner dans le désert la voix cristalline d’une eau vive qui nous appelle. C’est voir la mer du haut de la tour où est restée prisonnière notre enfance. C’est reposer ses yeux tristes sur un paysage de cigognes et de cloches. C’est occuper un territoire où cohabitent les parfums et les armes. C’est dicter sa loi à chaque rose et en même temps la recevoir de son épée. C’est prendre les sentiments pour un brasier qui jaillit du cœur. C’est maîtriser la lumière du feu et en même temps être esclave de la flamme. C’est comprendre la conversation intime du cœur et de la distance. C’est trouver le chemin qui mène au royaume de la musique absolue. […]
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Estar enamorado, amigos, es encontrar el nombre justo de la vida. Es dar al fin con la palabra que para hacer frente a la muerte se precisa. Es recobrar la llave oculta que abre la cárcel en que el alma está cautiva. [Es levantarse de la tierra con una fuerza que reclama desde arriba.] Es respirar el ancho viento que por encima de la carne se respira. Es contemplar desde la cumbre de la persona la razón de las heridas. Es advertir en unos ojos una mirada verdadera que nos mira. Es escuchar en una boca la propia voz profundamente repetida. Es sorprender en unas manos ese calor de la perfecta compañía. Es sospechar que, para siempre, la soledad de nuestra sombra está vencida.
Estar enamorado, amigos, es descubrir dónde se juntan cuerpo y alma. Es percibir en el desierto la cristalina voz del río que nos llama. Es ver el mar desde la torre donde ha quedado prisionera nuestra infancia. Es apoyar los ojos tristes en un paisaje de cigüeñas y campanas. Es ocupar un territorio donde conviven los perfumes y las armas. Es dar la ley a cada rosa y al mismo tiempo recibirla de su espada. Es confundir el sentimiento con una hoguera que del pecho se levanta. Es gobernar la luz del fuego y al mismo tiempo ser esclavo de la llama. Es entender la pensativa conversación del corazón y la distancia. Es encontrar el derrotero que lleva al reino de la música sin tasa.
[Estar enamorado, amigos, es adueñarse de las noches y de los días.
Es olvidar entre los dedos emocionados la cabeza distraída.
Es recordar a Garcilaso cuando se siente la canción de una herrería.
Es ir leyendo lo que escriben en el espacio las primeras golondrinas.
Es ver la estrella de la tarde por la ventana de una casa campesina.
Es contemplar el tren que pasa por la montaña con las luces encendidas.
Es comprender perfectamente que no hay fronteras entre el sueño y la vigilia.
Es ignorar en qué consiste la diferencia entre pena y alegría.
Es escuchar a medianoche la vagabunda confesión de la llovizna.
Es divisar en las tinieblas del corazón una pequeña lucecita.
Estar enamorado, amigos, es padecer espacio y tiempo con dulzura.
Es despertarse en la mañana con el secreto de las flores y las frutas.
Es liberarse de sí mismo y estar unido con las otras criaturas.
Es no saber si son ajenas o si son propias las lejanas amarguras.
Es remontar hasta la fuente las aguas turbias del torrente de la angustia.
Es compartir la luz del mundo y al mismo tiempo es compartir la noche obscura.
Es asombrarse y alegrarse de que la luna todavía sea luna.
Es comprobar en cuerpo y alma que la tarea de ser hombre es menos dura.
Es empezar a decir siempre y en adelante no volver a decir nunca.
Y es además, amigos míos, estar seguro de tener las manos puras.]
– Maman, steuplait, on peut regarder un dessin animé ? Steuplait ! Steuplait !
– Non les enfants, pas maintenant ! Faites d’abord vos exercices de contrebasse et, si vous avez bien travaillé, nous verrons… ! D’ailleurs votre professeur Božo Paradžik vous attend dans le jardin…
Les garnements se mettent donc au travail, l’esprit tout entier occupé par la future récompense… et, si la qualité de l’effort s’entend, le message aussi :
Alors, chose promise, chose due :
– Allez, tous devant l’écran, La Panthère rose vous attend… en musique, bien sûr !
Adore ton métier, c’est le plus beau du monde !
Le plaisir qu’il te donne est déjà précieux,
Mais sa nécessité réelle est plus profonde…
II apporte l’oubli des chagrins et des maux,
Et ça, vois-tu, c’est encor mieux !
C’est mieux que tout, c’est magnifique et tu verras,
Tu verras ce que c’est qu’une salle qui rit,
Tu l’entendras !
Ça, c’est unique, mon chéri !
Jean-Gaspard Deburau 1796-1846 par Arsène Trouvé
Derrière son maquillage livide, Jean-Gaspard Deburau, né à la fin du XVIIIème siècle à Amiens, de l’union d’une mère venue de Bohème et d’un soldat français, faisait le plaisir et l’admiration des « naïfs et des enthousiastes », comme il aimait à qualifier avec humour et gentillesse son fidèle public du ‘Théâtre des Funambules’, qui venaient rire aux facéties et mimiques du personnage de Pierrot qu’il avait créé.
Sacha Guitry 1885-1957
Comment l’amoureux inconditionnel du théâtre et du métier de comédien qu’était Sacha Guitry, aurait-il pu résister à l’envie d’incarner cet illustre personnage capable de réaliser chaque soir avec le même bonheur cette performance éminemment difficile, gageure des gageures : entraîner une salle dans le rire ?
En février 1918, le ‘Théâtre du Vaudeville’ met à l’affiche une pièce signée Sacha Guitry : « Deburau ». Un orchestre, pour accompagner les comédiens, y joue la musique composée par André Messager.
Sa production nombreuse pour le théâtre n’empêche pas Guitry, à partir des années 1930, d’être définitivement gagné par le cinéma. En 1951, le comédien-dramaturge devenu réalisateur décide de mettre sa pièce en images et écrit un scénario dans lequel le célèbre mime Deburau, époux modèle résistant fièrement aux mille sollicitations de ses admiratrices, finit par s’éprendre, amour impossible, d’une dame portant camélia à la ceinture.
Le rôle, certes, n’est pas en manque de texte ; trop de paroles, peut-être, proposées à un mime pour qui seul le rire a droit de déchirer le silence. Mais quand l’alexandrin surgit de l’encrier d’un Sacha Guitry auteur prolifique au verbe affûté et qu’il nous parvient à travers la voix et le jeu emblématiques d’un Sacha Guitry comédien brillant aux mille facettes… qui s’en plaindrait ?
Ce rôle, très empreint du romantisme qui envahit la vie du Maître à cette époque – il souffre physiquement et reste encore très affecté par les injustes attaques portées contre lui à la Libération – Guitry le voulait comme son testament spirituel.
Et c’est, sans conteste, dans l’admirable monologue de Deburau exaltant le métier de comédien à travers les conseils qu’il prodigue à son fils s’apprêtant à entrer en scène pour lui succéder, que Sacha Guitry exprime en toute sincérité cet amour de la scène qui le représente tant.
Magnifique leçon d’un Pierrot à qui l’on pardonne volontiers de parler autant, et nouvelle occasion de regretter que sa voix se soit tue.
Musique composée en 1944 pour le film Henry V réalisé par l’immense interprète de Shakespeare, Sir Laurence Olivier.
Le thème de la passacaille commence alors que la caméra quitte la rue sombre et pénètre par la fenêtre dans une chambre d’auberge faiblement éclairée par la flamme d’une bougie. Dans le lit un vieil homme se meurt, Falstaff, ce héros comique inoubliable, mangeur et buveur à l’excès, roublard, vantard, poltron et lâche, à la mauvaise foi maladive, et pourtant si attachant. Dans un dernier sursaut le caricatural chevalier entend, le coeur brisé, la voix de son ancien et cher compagnon de frasques, le Prince Hal devenu Roi, s’apprêtant à conquérir la France, lui asséner mille reproches.
Mais au cinéma quand les personnages parlent, fussent-ils mourants ou absents, la musique s’efface. Et la belle passacaille que Walton avait composée pour accompagner la scène serait restée à jamais attachée à la pellicule, si le compositeur n’avait pas autorisé que deux pièces musicales dont celle-ci fussent extraites de la bande originale pour constituer la suite orchestrale Henry V. – Walton qui considérait que toute musique de film trouvant son utilité hors des images n’aurait pas satisfait à sa vocation.
Tout le monde peut se tromper !
La Mort de Falstaff (passacaille)
London Philharmonic Orchestra
Direction : Léonard Slatkine
Alors, prudent et sage, j’ai décidé d’en aimer deux !
Une brune Velma Kelly, et une blonde, évidemment. Roxie Hart.
Toutes les deux accusées d’homicides, qui condamnera ma bigamie ?
Criminelles, certes, mais tout de même, les victimes avaient bien « mérité » leur sort : un mari qui vous trompe avec votre propre sœur… Un amant qui fait de fausses promesses à vos ambitions pour profiter de vous…
Dans les yeux des cinéastes, les femmes de faits divers se transforment en muses, sitôt érigées sur la pellicule en figures mythologiques semblant défier l’ordre, tantôt bourgeois, patriarcal, sociétal.
Lucille Quillet (journaliste – Les femmes et le crime)
Catherine Zeta-Jones (Velma Kelly) – Renée Zellweger (Roxie Hart) CHICAGO – Film 2002
Avant de devenir muses, Velma et Roxie, « mes » femmes de pellicule, étaient femmes de faits divers :
Deux criminelles, Beulah Annan et Belva Gaertner, avaient en effet, en 1924, défrayé la chronique judiciaire du Chicago du temps de la prohibition et du jazz triomphant. Leur détermination sans bornes à échapper à la peine de mort et à, retrouver pour l’une, et trouver pour l’autre, la gloire des scènes de cabaret avait inspiré une pièce de théâtre, « Chicago », à une journaliste de l’époque qui couvrait abondamment l’évènement.
Les personnages de Velma et Roxie étaient nés, qui vivraient désormais, à travers la célèbre comédie musicale américaine de Bob Fosse, en 1975, et sa très appréciée adaptation cinématographique par Rob Marshall, en 2002, une vie de danse, de chants et de paillettes, au rythme du Jazz des Années Folles, sur fond de justice pénale et de corruption.
Pouvait-on mieux flatter notre plaisir ?
Catherine Zeta-Jones (Velma Kelly)
Ramène-toi la ville nous tend les bras Moi, faut qu’ça jazze !
J’ai fardé mes genoux et déroulé mes bas Moi, faut qu’ça jazze !
Bouge ta caisse, j’connais un coin dément où le gin coule à flots sur un piano brûlant, et chaque soir dans ce sacré boxon ça se termine en baston, Moi, faut qu’ça jazze !
Plaque ta mèche et mets tes pompes vernies Moi, faut qu’ça jazze !
J’entends dire que le vieux Dip balance du blues à fond Moi, faut qu’ça jazze !
Viens chéri, on va s’faire des câlins j’ai acheté de l’Aspirine à la pharmacie du coin si tu ne tiens pas l’coup s’il faut que tu redémarres Moi, faut qu’ça jazze !
[…]
Renée Zellweger (Roxie Hart)
Le nom sur toutes les lèvres Ce sera Roxie La dame qui balance les jetons Ce sera Roxie
Je vais être une célébrité Cela signifie que tout le monde me reconnaîtra Ils reconnaîtront mes yeux Mes cheveux, mes dents, mes seins, mon nez
Pour ne pas juste être la femme
D’un quelconque mécanicien Je vais être Roxie Qui dit que le meurtre n’est pas un art ?
Et qui, si elle n’est pas pendue, Dira que tout commença par un Bang ? Foxy Roxie Hart !
"Chicago" - Film 2002 / Synopsis :
Velma Kelly attise les foules, chaque soir, au cabaret. Roxie Hart n'a qu'un rêve, monter sur scène et ressembler à son idole. Mais arrêtées l'une et l'autre pour leurs crimes respectifs, c'est à la prison qu'elles se rencontrent.Billy Flynn, leur avocat, retors, rusé et maître ès corruptions, dont elles se disputent les services, charmé par Roxie, va réussir à convaincre le public et la justice que sa protégée est le vivant symbole de la naïveté abusée. Elle deviendra la femme la plus populaire de Chicago... Velma détrônée essaiera, pour rattraper son succès passé, de la convaincre de former un duo...
Je voudrais te parler à bouche perdue
Comme on parle sans fin dans les rêves
Te parler des derniers jours à vivre
Dans la vérité tremblante de l’amour
Te parler de toi, de moi, toujours de toi
De ceux qui vont demeurer après nous
Qui ne connaîtront pas l’odeur de notre monde
Le labyrinthe de nos idées mêlées
Qui ne comprendront rien à nos songes
A nos frayeurs d’enfants égarés dans les guerres
Je voudrais te parler, ma bouche contre ta bouche
Non de ce qui survit ni de ce qui va mourir
Avec la nuit qui déjà commence en nous
De nos vieilles blessures ni de nos défaites
Mais des étés qui fleuriront nos derniers jours
J’ai tant de choses à te dire encore
Que ce ne serait pas assez long ce qui reste de mon âge
Pour raconter de notre amour les sortilèges
Je voudrais retrouver les mots de l’espoir ivre
Pour te parler de toi, de tes yeux, de tes lèvres
Et je ne trouve plus que les mots amers de la déroute
Je voudrais te parler, te parler, te parler
Albert Ayguesparse 1900-1996
Les armes de la guérison – Éditions André De Rache / 1973
Dieu, ton plaisir jaloux est de briser les cœurs !
Tu bats de tes autans le flot où tu te mires !
Oh ! pour faire, Seigneur, un seul de tes sourires,
Combien faut-il donc de nos pleurs ?
Stéphane Mallarmé – ‘Élégies‘ II-3
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In everyone’s life there is a summer of ’42
Pourla musique de Michel Legrand
Pour le charme lumineux de Jennifer O’Neil
Pour le juste reflet de l’adolescent qu’incarne Gary Grimes
Pour le film de Robert Mulligan, « Summer of ’42 » (1971)
Pour sentir encore le parfum nostalgique du premier amour… et
Pour, une dernière fois, de ses larmes en goûter le sel
◊
L’adolescence, comme le prétendait François Truffaut, ne laisse-t-elle un bon souvenir qu’aux adultes ayant mauvaise mémoire ?
À quoi la musique fait appel en nous, il est difficile de le savoir. Ce qui est certain, c’est qu’elle touche une zone si profonde que la folie elle-même n’y saurait pénétrer.
Cioran – De l’inconvénient d’être né (1973)
En Italie, à l’époque baroque, on affirmait que la victime d’une morsure de tarentule devait danser, longtemps et avec frénésie, une « tarentelle » pour chasser le mal que l’araignée lui avait inoculé. Mais encore fallait-il, pour que la thérapie fût efficace, que la tarentelle choisie plût à l’araignée…
Aujourd’hui, et depuis La Danza du grand Rossini, la morsure n’est plus obligatoire et la danse se contente parfois de n’être que chantée.
Quant au choix du lieu… tout est désormais permis, du garage à la cuisine en passant par la scène.
Le choix du lieu n’affecte ni le plaisir, ni la bonne humeur… et encore moins la virtuosité.
Côté scène : Patricia Janečková – « La Danza » – Gioachino Rossini
Già la luna è in mezzo al mare,
mamma mia, si salterà!
L’ora è bella per danzare,
chi è in amor non mancherà.
Già la luna è in mezzo al mare, mamma mia, si salterà!
Presto in danza a tondo, a tondo, donne mie venite qua, un garzon bello e giocondo a ciascuna toccherà, finchè in ciel brilla una stella e la luna splenderà. Il più bel con la più bella tutta notte danzerà.
Mamma mia, mamma mia, già la luna è in mezzo al mare, mamma mia, mamma mia, mamma mia, si salterà.
Salta, salta, gira, gira,
ogni coppia a cerchio va,
già s’avanza, si ritira
e all’assalto tornerà.
Già s’avanza, si ritira e all’assalto tornerà!
Serra, serra, colla bionda, colla bruna và quà e là colla rossa và a seconda, colla smorta fermo sta. Viva il ballo a tondo a tondo, sono un Re, sono un Pascià, è il più bel piacer del mondo la più cara voluttà.
Mamma mia, mamma mia, già la luna è in mezzo al mare, mamma mia, mamma mia, mamma mia, si salterà.
Frinche, frinche, frinche, frinche, frinche, frinche, mamma mia, si salterà.
La! la ra la ra la ra la la ra la
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Côté garage : Louis de Funès – Le Corniaud – Film de Gérard Oury – 1965
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Côté cuisine (avec ustensile) : Patricia Janečková – « La Danza » – Gioachino Rossini
Dans le malheur, l’amour devient plus grand et plus noble.
Gabriel Garcia-Marquez
(« L’amour au temps du choléra » – 1985)
May all your storms be weathered
And all that’s good get better *
Shirley Horn – « Here’s to life »
* Puisses-tu surmonter toutes tes tempêtes Et embellir tous tes bonheurs
En 2011, vision prémonitoire pour le moins, David Mackenzie réalise un film, « PERFECT SENSE », dont le synopsis est le suivant :
Le monde des humains est frappé par une étrange épidémie qui détruit progressivement les cinq sens des personnes atteintes par le virus. Le monde perd ses repères, ses équilibres. Au cœur de cette tragédie un cuisinier, que la pandémie prive d’une large part de son activité, et une brillante infectiologue, aussi engagée que perplexe, tombent amoureux…
Une voix off conduit le récit entre effroi et romantisme jusqu’à une scène finale particulièrement poignante.
Un youtubeur dont je ne connais que la signature, OS. BEND, a eu, il y a peu, la belle idée de réaliser un montage de quelques images du film sur un standard du Jazz vocal, aussi cher à mes oreilles qu’à mon cœur, – qui, précision importante, n’est pas la musique originale du film, composée par Max Richter. Cette judicieuse bande son de substitution c’est « Here’s To Life », de et par Shirley Horn dans la superbe version qu’elle enregistra aux studios Verve en 1992.
Ce talentueux mixage, par l’harmonie qu’il entretient entre les images choisies, la grâce naturelle des deux acteurs, Eva Green et Edward McGregor, qui les enlumine, et la voix magique de Shirley Horn, si simplement romantique, ajoute au souvenir de ce film un très émouvant supplément de poésie.
L’amour, comme un sixième sens que la catastrophe n’atteint pas…
No complaints and no regrets I still believe in chasing dreams and placing bets But I had learn that all you give is all you get So give it all you got
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I had my share I drank my fill And even though I’m satisfied I’m hungry still To see what’s down another road beyond the hill And do it all again
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So here’s to life And every joy it brings So here’s to life To dreamers and their dreams
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Funny how the time just flies How love can go from warm hellos To sad goodbyes And leave you with the memories you’ve memorized To keep your winters warm
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For there’s no yes in yesterday And who knows what tomorrow brings or takes away As long as I’m still in the game I want to play For laughs for life for love
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So here’s to life And every joy it brings Here’s to life For dreamers and their dreams May all your storms be weathered And all that’s good get better
Here’s to life Here’s to love Here’s to you May all your storms be weathered And all that’s good get better
. Here’s to life Here’s to love Here’s to you
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En décembre 2020, un billet publié sur « De Braises et d’Ombre » :