Flâner entre le rêve et le poème… Ouvrir la cage aux arpèges… Se noyer dans un mot… S'évaporer dans les ciels d'un tableau… Prendre plaisir ou parfois en souffrir… Sentir et ressentir… Et puis le dire – S'enivrer de beauté pour se forcer à croire !
Why he had to go I don’t know he wouldn’t say I said something wrong, now I long for yesterday
Yesterday All my troubles seemed so far away Now it looks as though they’re here to stay Oh, I believe in yesterday
Suddenly I’m not half the girl I used to be There’s a shadow hanging over me Oh, yesterday came suddenly
Why he had to go I don’t know he wouldn’t say I said something wrong, now I long for yesterday
Yesterday Love was such an easy game to play Now I need a place to hide away Oh, I believe in yesterday
Why he had to go I don’t know he wouldn’t say I said something wrong, now I long for yesterday
Yesterday Love was such an easy game to play Now I need a place to hide away Oh, I believe in yesterday
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Too many musicians rush through everything with too many notes. A ballad should be a ballad. It’s important to understand what the song is saying, and learn how to tell the story. It takes time. I can’t rush it. I really can’t rush it.
Shirley Horn
Trop de musiciens se précipitent à travers tout avec trop de notes. Une ballade doit être une ballade. Il est important de comprendre ce que dit la chanson et d'apprendre à raconter l'histoire. Ça prend du temps. Je ne peux pas me précipiter. Je ne peux vraiment pas me précipiter.
Dans le malheur, l’amour devient plus grand et plus noble.
Gabriel Garcia-Marquez
(« L’amour au temps du choléra » – 1985)
May all your storms be weathered
And all that’s good get better *
Shirley Horn – « Here’s to life »
* Puisses-tu surmonter toutes tes tempêtes Et embellir tous tes bonheurs
En 2011, vision prémonitoire pour le moins, David Mackenzie réalise un film, « PERFECT SENSE », dont le synopsis est le suivant :
Le monde des humains est frappé par une étrange épidémie qui détruit progressivement les cinq sens des personnes atteintes par le virus. Le monde perd ses repères, ses équilibres. Au cœur de cette tragédie un cuisinier, que la pandémie prive d’une large part de son activité, et une brillante infectiologue, aussi engagée que perplexe, tombent amoureux…
Une voix off conduit le récit entre effroi et romantisme jusqu’à une scène finale particulièrement poignante.
Un youtubeur dont je ne connais que la signature, OS. BEND, a eu, il y a peu, la belle idée de réaliser un montage de quelques images du film sur un standard du Jazz vocal, aussi cher à mes oreilles qu’à mon cœur, – qui, précision importante, n’est pas la musique originale du film, composée par Max Richter. Cette judicieuse bande son de substitution c’est « Here’s To Life », de et par Shirley Horn dans la superbe version qu’elle enregistra aux studios Verve en 1992.
Ce talentueux mixage, par l’harmonie qu’il entretient entre les images choisies, la grâce naturelle des deux acteurs, Eva Green et Edward McGregor, qui les enlumine, et la voix magique de Shirley Horn, si simplement romantique, ajoute au souvenir de ce film un très émouvant supplément de poésie.
L’amour, comme un sixième sens que la catastrophe n’atteint pas…
No complaints and no regrets I still believe in chasing dreams and placing bets But I had learn that all you give is all you get So give it all you got
.
I had my share I drank my fill And even though I’m satisfied I’m hungry still To see what’s down another road beyond the hill And do it all again
.
So here’s to life And every joy it brings So here’s to life To dreamers and their dreams
.
Funny how the time just flies How love can go from warm hellos To sad goodbyes And leave you with the memories you’ve memorized To keep your winters warm
.
For there’s no yes in yesterday And who knows what tomorrow brings or takes away As long as I’m still in the game I want to play For laughs for life for love
.
So here’s to life And every joy it brings Here’s to life For dreamers and their dreams May all your storms be weathered And all that’s good get better
Here’s to life Here’s to love Here’s to you May all your storms be weathered And all that’s good get better
. Here’s to life Here’s to love Here’s to you
— ¤ —
En décembre 2020, un billet publié sur « De Braises et d’Ombre » :
I have learned that all you give is all you get
So give it all you’ve got
Shirley Horn (1934-2005) – Photo 1991
Pour la voix « pleine de force et de majesté » de Shirley Horn
Pour les paroles empreintes de sage nostalgie ébauchées par Artie Butler qui dit avoir composé cette ballade à travers le regard mélancolique d’un vieil homme penché sur son passé, et qui aurait conservé intact son optimisme envers le temps qui reste.
Pour l’arrangement musical de Johnny Mandel qui a sans doute réalisé là le dernier grand standard du jazz américain, et le titre signature de Shirley Horn dont l’interprétation profonde et suave représente un legs majeur à l’histoire du jazz vocal déjà si bien représenté par ailleurs.
Pour la qualité de l’enregistrement de 1992, avec orchestre, en studio.
POUR LE PLAISIR ! POUR LE PLAISIR ! POUR LE PLAISIR !
Aucune plainte et aucun regret Je crois toujours à la poursuite des rêves et aux paris Mais j’ai appris que tout ce qu’on donne est tout ce qu’on obtient Alors donne tout ce que tu as reçu
J’ai eu ma part, j’ai bu ma dose Et même si je m’en satisfais Je veux encore voir ce qu’il y a sur d’autres routes Là-bas, au-delà de la colline Et tout recommencer
Alors voilà, à la vie et à toutes les joies qu’elle procure À la vie, pour les rêveurs et leurs rêves
C’est drôle comme le temps passe vite Comment l’amour peut-il passer De la chaleur de l’enfer à la tristesse des adieux Et nous laisser avec nos souvenirs qu’on appelle Pour réchauffer nos hivers
Car hier est passé et qui sait ce que demain apporte Ou emporte Tant que je suis encore dans le jeu je veux jouer Pour rire, pour vivre, pour aimer
Alors à la vie et à toutes les joies qu’elle apporte À la vie, aux rêveurs et à leurs rêves
Puisses-tu surmonter tes tempêtes Et embellir tes bonheurs À la vie, à l’amour, à toi (bis)
Traduction personnelle
La reconnaissance, pour Shirley Horn, a été tardive mais à la différence de bien des musiciens qui attendent longtemps que leur heure survienne, la raison de ce retard est liée dans son cas à des choix personnels. Aussi, son retour au devant de la scène à l’âge mûr a-t-il révélé au grand public une chanteuse d’une rare authenticité, chez qui l’émotion la plus pure se conjuguait à une musicalité sans pareille dont témoignait son aura auprès des musiciens. Comme les grandes chanteuses de jazz, Shirley Horn possédait non seulement un timbre de voix inimitable mais surtout un art d’interpréter les chansons avec un sens consommé de la mise en scène, chanteuse du clair-obscur et de la note feutrée.
Vincent Bessières - Directeur de la revue "Jazz & People"
(Introduction d'un portrait de Shirley Horn publié sur le site de la Philharmonie de Paris)
Ne croyez pas les mains sans gants plus robustes que les autres.
Gustave Flaubert – « Par les champs et par les grèves »
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Il n’y a guère que Mickey qui aujourd’hui porte ses gants blancs à longueur de journée.
Aussi, si vous affirmez que pour vous, porter des gants blancs s’inscrit dans la banalité des actions régulières de votre vie, ne soyez pas étonné(e) que, sans vous connaître, et certain que vous n’êtes pas Mickey Mouse, l’on vous donne du « Mon Général » ou du « Maître d’hôtel » ; ou encore, que l’on guette attentivement le lapin ou l’as de trèfle que vous cachez fort adroitement dans votre manche. A moins que vous ne soyez Huissier au Sénat ? Conservatrice responsable des incunables à la Bibliothèque Nationale ? Déménageur de tableaux au Louvre ?…
Ou, pourquoi pas, cet initié, tapi dans sa réserve légendaire, qui, certains soirs, symbolique oblige, enfile rituellement ses gants de lumière en fraternelle compagnie…?
A y bien regarder, les opportunités de porter des gants blancs ne sont en vérité pas aussi rares qu’on le penserait au premier abord, et pas nécessairement liées d’ailleurs à un protocole d’apparat.
Mais quel pervers faudrait-il être pour demander à une pianiste de faire chanter son instrument, les doigts ainsi embastillés, avec la virtuosité et la délicatesse de toucher qu’exige le meilleur du jazz ?
A l’impossible nul ne peut être tenu !
Et pourtant :
Quelques fascinantes minutes sous le vent froid et la pluie d’un vieux 15 août, avec la géniale Diva du jazz, Shirley Horn, au festival de Newport, et la démonstration du contraire devient imparable.
En gants blancs, la Diva ! Et quelle Diva !
Les gants blancs peuvent accessoirement protéger du froid…
Pour applaudir, assurément, ils ne sont sont d’aucune utilité.
Just in time
I found you just in time Before you came my time Was running low
. I was lost
The losing dice were tossed My bridges all were crossed
. Nowhere to go
Now you’re here And now I know just where I’m going No more doubt or fear
I found my way
.
For love came just in time You found me just in time And saved my lonely life That lovely day
Car le poète est un four à brûler le réel. De toutes les émotions brutes qu’il reçoit, il sort parfois un léger diamant d’une eau et d’un éclat incomparables. Voilà toute une vie comprimée dans quelques images et quelques phrases. Pierre Reverdy