Flâner entre le rêve et le poème… Ouvrir la cage aux arpèges… Se noyer dans un mot… S'évaporer dans les ciels d'un tableau… Prendre plaisir ou parfois en souffrir… Sentir et ressentir… Et puis le dire – S'enivrer de beauté pour se forcer à croire !
J’ai passé devant tant de portes Dans le couloir des peurs perdues et des rêves séquestrés J’ai entendu derrière les portes des arbres qu’on torturait Et des rivières qu’on essayait de dompter
J’ai passé devant la porte dorée de la connaissance Devant des portes qui brûlaient et qui ne s’ouvraient pas Devant des portes lasses de s’être trop fermées D’autres comme des miroirs où ne passaient que les anges
Mais il est une porte simple, sans verrou, ni loquet Tout au fond du couloir tout à l’opposé du cadran La porte qui conduit hors de toi Personne ne la pousse jamais
Nous descendrons demain par des portes de foudre, et je veux, pour ce jour d’étranges épousailles, qu’une voix simplement s’élève et dise : joie. Joie pour ce court chemin que nous avons tracé dans la solitude du sang, joie pour l’éclair et l’ombre et pour ce temps là-bas qui montait en poussière avide d’horizon, temple de sable soulevé, fête d’atomes. Joie. Joie pour le givre sur les feuilles, quand déjà montent dans l’arbre en murmures les renaissances dont la sève nourrit le chant.
Ô terre en fièvre d’accouchée qui recevras nos corps comme semences, et toi lumière infante, qui saigneras de tout le sang de nos saisons perdues sur les épis demain, déjà je chante et comme en rêve je me souviens de l’avenir.
In Offrandes (1995) – Éditeur : Voix d’encre
Jean-Yves Masson, né en 1962
Écrivain, critique et traducteur – Enseigne la littérature comparée à l’université Paris-Sorbonne
Cet amour Si violent Si fragile Si tendre Si désespéré Cet amour Beau comme le jour Et mauvais comme le temps Quand le temps est mauvais Cet amour si vrai Cet amour si beau Si heureux Si joyeux Et si dérisoire Tremblant de peur comme un enfant dans le noir Et si sûr de lui Comme un homme tranquille au milieu de la nuit Cet amour qui faisait peur aux autres Qui les faisait parler Qui les faisait blêmir Cet amour guetté Parce que nous le guettions Traqué blessé piétiné achevé nié oublié Parce que nous l’avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié Cet amour tout entier Si vivant encore Et tout ensoleillé C’est le tien C’est le mien Celui qui a été Cette chose toujours nouvelle Et qui n’a pas changé Aussi vraie qu’une plante Aussi tremblante qu’un oiseau Aussi chaude aussi vivante que l’été Nous pouvons tous les deux Aller et revenir Nous pouvons oublier Et puis nous rendormir Nous réveiller souffrir vieillir Nous endormir encore Rêver à la mort, Nous éveiller sourire et rire Et rajeunir Notre amour reste là Têtu comme une bourrique Vivant comme le désir Cruel comme la mémoire Bête comme les regrets Tendre comme le souvenir Froid comme le marbre Beau comme le jour Fragile comme un enfant Il nous regarde en souriant Et il nous parle sans rien dire Et moi je l’écoute en tremblant Et je crie Je crie pour toi Je crie pour moi Je te supplie Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s’aiment Et qui se sont aimés Oui je lui crie Pour toi pour moi et pour tous les autres Que je ne connais pas Reste là Là où tu es Là où tu étais autrefois Reste là Ne bouge pas Ne t’en va pas Nous qui nous sommes aimés Nous t’avons oublié Toi ne nous oublie pas Nous n’avions que toi sur la terre Ne nous laisse pas devenir froids Beaucoup plus loin toujours Et n’importe où Donne-nous signe de vie Beaucoup plus tard au coin d’un bois Dans la forêt de la mémoire Surgis soudain Tends-nous la main Et sauve-nous.
Je sais maintenant que je ne possède rien, pas même ce bel or qui est feuilles pourries, encore moins ces jours volant d’hier à demain à grands coups d’ailes vers une heureuse patrie.
Elle fut avec eux, l’émigrante fanée, la beauté faible, avec ses secrets décevants, vêtue de brume. On l’aura sans doute emmenée ailleurs, par ces forêts pluvieuses. Comme avant,
je me retrouve au seuil d’un hiver irréel où chante le bouvreuil obstiné, seul appel qui ne cesse pas, comme le lierre. Mais qui peut dire
quel est son sens ? Je vois ma santé se réduire, pareille à ce feu bref au-devant du brouillard qu’un vent glacial avive, efface… Il se fait tard.
In L’effraie – Gallimard / 1954
Philippe Jaccottet 1925-2021
Note personnelle au lecteur :
La lecture et l’interprétation d’un poème sont éminemment subjectives. La réalité et les intentions du poète écrivant ses vers se trouvent ainsi détournées par la sensibilité du lecteur qui, prenant à son compte les mots et les impressions qu’ils suggèrent, les affectera, au gré de sa sensibilité, à un autre univers de pensée, très personnel et parfois bien éloigné des circonstances qui auront présidé à la création de l’œuvre. Magie du poème !
Ce billet a délibérément choisi le sonnet d'un jeune poète pour illustrer le thème de la vieillesse.
Le poème, « Je sais maintenant que je ne possède rien... », Philippe Jaccottet l’a écrit alors qu’il avait à peine plus de 20 ans. A l’évidence la vieillesse ne faisait pas encore partie de ses préoccupations. Il cherchait à exprimer à travers ce sonnet en alexandrins son affectation d'avoir dû quitter, pour raisons professionnelles, sa Suisse natale pour le lointain pays de France. Déraciné, se sentant étranger loin de ses amis, jeune homme confronté à sa quête d’identité et de sens, le poète est envahi par un sentiment légitime d’isolement et de dépossession qu'il exprime ici en des mots que l’âge avancé pourrait volontiers revendiquer.
Nadia Tuéni ne cesse de renaître. Son œuvre qui dure et se prolonge sera de plus en plus écoutée, entendue. A travers les vibrations d’une voix qui exprime cruautés et splendeur, à travers la ferveur d’une parole qui creuse un chemin essentiel dans nos mémoires, elle demeure et demeurera présente : Je vis dans les mémoires qui fuient lucides un été incertain.
Andrée Chedid
Chaque histoire est l’histoire d’une seconde d’hésitation.
Nadia Tuéni
Nadia Tuéni (Liban 1935-1983)
Extrait de « Poèmes pour une histoire » (1972)
Musique : John Williams – Thème du film « La Liste de Schindler »
Ils sont morts à plusieurs C’est à dire chacun seul sur une même potence qu’on nomme territoire leurs yeux argiles ou cendres emportent la montagne en otage de vie.
Alors la nuit la nuit jusqu’au matin puis de nouveau la mort et leur souffle dernier dépose dans l’espace la fin du mot. Quatre soleils montent la garde pour empêcher le temps d’inventer une histoire.
Ils sont morts à plusieurs sans se toucher sans fleur à l’oreille sans faire exprès une voix tombe : c’est le bruit du jour sur le pavé.
Crois-tu que la terre s’habitue à tourner ? Pour plus de précision ils sont morts à plusieurs par besoin de mourir comme on ferme une porte lorsque le vent se lève ou que la mer vous rentre par la bouche…
Alors ils sont bien morts ensemble c’est-à-dire chacun seul comme ils avaient vécu.
∞
Résumé biographique publié sur
'Perles d'Orphée' le 14/12/2012
Née au Liban d’un père diplomate et écrivain de religion druze et d’une mère française, Nadia Hamadé fréquente, jeune, à Beyrouth, les sœurs de Besançon puis la Mission laïque française. Son père, Mohamad Ali Hamadé, devenu ambassadeur à Athènes, l’y inscrit au lycée français.Se destinant à la profession d’avocat, elle arrête ses études de droit pour devenir, en 1954, Madame Tuéni. Son époux, Ghassan Tuéni, journaliste et député, occupera, entre 1977 et 1982 le poste d’ambassadeur du Liban à l’ONU. De ce mariage naîtront deux garçons et une fille, Nayla.Frappée à l’âge de sept ans par un cancer fatal, Nayla meurt, laissant une irréparable cicatrice au cœur de sa mère. Ce drame conduira Nadia à la création poétique ; en 1963 paraît « Les textes blonds », son premier pas dans l’univers de la poésie. Chaque vers porte l’empreinte de la douleur d’une mère. Souffrance redoublée, Nadia sera elle-même victime d’un mal comparable à celui qui emporta Nayla.Avec son second recueil, paru en 1965 aux Éditions Seghers, « L’Âge d’écume », Nadia trouve la reconnaissance du monde francophone.La parution des « Poèmes pour une histoire » en 1972 lui apporte la consécration lorsque l’année suivante elle se voit décerner le prix de l’Académie Française. Elle obtiendra ensuite deux distinctions notables, décorée de l’ordre de la Pléiade et de l’ordre de la Francophonie et du dialogue des cultures.Nadia Tueni trouve ses racines profondes dans cette terre du Liban, œil continuellement ouvert sur le Moyen-Orient déchiré. Cette terre c’est son lieu, un « Arrière-Pays », comme elle l’écrira, qui porte la marque du sacré. Elle lui consacrera en 1979 un recueil de poèmes, « Liban : 20 poèmes pour un amour ». Beyrouth, Saïda, Baalbeck, et tant d’autres régions y reçoivent l’infinie caresse de sa sensualité.Et toujours, derrière ce style déferlant, en forme de vague, sans ponctuation, où le rythme occupe une place de premier plan, se faufilent, inéluctablement, la dualité de sa culture et la lourde nécessité de l’exil. (Nadia Tueni a aussi écrit des poèmes en arabe).En 1982, paraît « Archives sentimentales d’une guerre au Liban », et en 1984, aux Editions Belfond, le recueil posthume, « La terre arrêtée ».Son cancer aura triomphé d’elle en 1983.
C’est quoi une vie d’homme ? C’est le combat de l’ombre et de la lumière… C’est une lutte entre l’espoir et le désespoir, entre la lucidité et la ferveur… Je suis du côté de l’espérance, mais d’une espérance conquise, lucide, hors de toute naïveté.
Combien de fois aurai-je dit ou écrit, empruntant l’expression à mon cher Cioran, que j’étais poète par tous les vers que je n’avais jamais écrits ? Combien de fois, l’âme bouleversée, aurai-je rêvé, le temps d’une lecture – et d’une relecture, pour faire durer et l’illusion et le plaisir –, être l’auteur des vers qui m’emportaient vers un ailleurs dont je ne supposais même pas l’existence ? A l’heure même où je franchis une énième dizaine de mes années, me croyant enfin hors d’atteinte, je découvre la poésie de Colette Gibelin.
Qui au bout des ans resterait sourd à son exhortation ?
Que faire maintenant ? N’attends pas le soleil, invente-le N’attends pas que la vie s’épanouisse étreins-la
Fais simplement ta part de colibri avec ténacité Accueille en toi les lumières du silence Continue le chemin même si raboteux Une source neuve jaillit à chacun de tes pas
Touché ! En plein coeur.
≈
Entre doute et ferveur (extrait)
Au-delà de la mer, disais-tu, quelles lumières ? Vers quel destin de pierre et de sable tourner des visages creusés par la brûlure d’exister ? Le vent tournoie. Le vent fait vibrer l’impossible, violon pour la soif, jungle verte dans l’ocre désert.
Au-delà, je répète au-delà, pour savourer le mot dans ses contours d’eau pure, Au-delà, c’est déjà dire le grand saut dans l’aube libre aux senteurs d’oasis. Et le rêve revient s’accroche comme lierre aspire la sève pour la pulpe à venir Toujours, la pulpe est à venir. Demain sera de menthe et de jasmin Demain peut-être ?
La mer, franchir la mer, la mémoire et l’exil. Le jour palpite comme une île, minuscule cœur de l’immensité.
Depuis longtemps les grands oiseaux ont pris le large, aile sauvage et magnifique envol. Atteindront-ils l’Eldorado qui danse, feu follet, danse dans le regard chargé de tant de brume et se perd au lointain ?
Au-delà de la mer comme un mirage à l’infini, cette terre brûlée en attente de pluie. Interminable combat des vivants pour que s’installe une clarté vivace. Lancinante espérance.
Dans l’ombre de tes yeux j’ai vu passer tous les instants du vivre, noires blessures, éclats du soleil, chemins d’herbes et de poussière, Et tu rayonnais malgré la détresse.
Si la mort est au bout du chemin, qu’elle soit l’estuaire où la rivière abandonne ses boues pour entrer, nue, dans l’océan.
Au-delà des mers, disais-tu, Quelles sources nouvelles ?
Un jour quand nous dirons : “c’était le temps du soleil, Vous souvenez- vous, il éclairait la moindre famille, Et aussi bien la femme âgée que la jeune fille étonnée, Il savait donner leur couleur aux objets dès qu’il se posait. Il suivait le cheval coureur et s’arrêtait avec lui, C’était le temps inoubliable où nous étions sur la Terre, Où cela faisait du bruit de faire tomber quelque chose, Nous regardions alentour avec nos yeux connaisseurs, Nos oreilles comprenaient toutes les nuances de l’air Et lorsque le pas de l’ami s’avançait nous le savions, Nous ramassions aussi bien une fleur qu’un caillou poli. Le temps où nous ne pouvions attraper la fumée, Ah ! c’est tout ce que nos mains sauraient saisir maintenant”.
La poésie de Barbara Auzou jumelle la grâce fragile d’un papillon et l’état d’être du visionnaire.
Ile Eniger – Préface de Grand comme – éditions unicité / 2024
Grand comme (extraits : pages 94 à 96)
vivre au fond est une énigme sur une route d’herbes et d’encres sauvages nous avons grandi trop vite dans d’illusoires jardins aux lèvres nos harmonicas comme seuls accordéons de voyage
on nous a dit il n’y a rien dans l’orbite des pierres passez votre chemin on nous a dit la rose évasive s’évanouit au matin soyons quittes on nous a dit que l’invasion du lierre étouffait l’amour et la peau de chagrin que la rosée excite
on a feuilleté herbiers et dictionnaires cherchant à comprendre en vain la belle inquiète son parfum de romarin sa beauté ordinaire qui s’invite parfois en nos mains pourtant une étoile au loin s’accroche à son dernier empire assommée de petit matin et elle t’empoignera tout à l’heure par les pans de ta veste par les plis de ton cœur et par les très longs cheveux de la conscience claire tu verras alors danser sans la moindre peine tout ce que la vie promet de mort et les formidables efforts pour la combler depuis le premier jour
Toute confidence exige d’être méritée. (Jean-Claude Pirotte – Cavale)
Même si tout s’arrêtait là…
Même si tout s’arrêtait là, Au dernier souffle, à la fosse, à la cendre, Même s’il me fallait descendre Ces escaliers qui ne conduisent nulle part,
Cela valait la peine d’être né, D’avoir bu à longs traits le vin de l’existence, D’avoir connu des joies et des douleurs intenses, D’avoir aimé, d’avoir lutté, d’avoir pleuré.
Je n’ai pourtant pas fait des étincelles, Rien que ces choses que l’on dit très ordinaires. Mes fautes ne sont pas des actes mais des manques. Je confesse médiocrité.
Mais j’ai parfois marché sur l’eau, flotté dans l’air, Je me suis vu sur la plus haute vague, J’ai respiré un peu d’éternité.
La musique repose sur l’harmonie entre le Ciel et la Terre, sur la coïncidence du trouble et du clair.
Hermann Hesse – Narcisse et Goldmund
♫
MUSIQUE
J’aurais voulu de temps en temps être musique, et, privé de mon corps, partir avec le vent sur les fleuves perdus, les vautours en révolte, les troupeaux d’arbres fous qui broutent les hameaux.
De temps en temps j’aurais voulu être un murmure interrompant le long silence du silex et le forçant enfin de m’expliquer pourquoi il a l’air malheureux comme un astre qui tombe.
De temps en temps j’aurais voulu être un soupir chez les insectes roux qui détruisent la pomme, la sapotille et la pastèque trop crédule.
J’aurais voulu de temps en temps être un refrain qui unit sans raison ni astuce perverse le désespoir de vivre aux douceurs de la vie.
Nella mia giovinezza ho navigato
Lungo le coste dalmate. Isolotti
A fior d’onda emergevano, ove raro
Un uccello sostava intento a prede,
Coperti d’alghe, scivolosi, al sole
Belli come smeraldi. Quando l’alta
Marea e la notte li annullava, vele
Sottovento sbandavano più al largo,
Per fuggirne l’insidia. Oggi il mio regno
E quella terra di nessuno. Il porto
Accende ad altri i suoi lumi; me al largo
Sospinge ancora il non domato spirito,
E della vita il doloroso amore.
Umberto Saba 1883-1957
Mediterranee.
Mondadori editore, Milano, 1946
Ulysse
Dans ma jeunesse j’ai navigué
le long des côtes dalmates. Des îlots
à fleur d’onde émergeaient, où quelque rare
oiseau se posait guettant sa proie ;
couverts d’algues, glissants, ils luisaient
au soleil, beaux comme des émeraudes.
Quand la marée haute et la nuit
les effaçaient, des voiles
sous le vent se dispersaient au large,
pour en fuir les écueils. Aujourd’hui mon royaume
est cette terre de personne. Le port
fait briller pour d’autres ses lumières ; moi, vers le large
me pousse encore un esprit indompté,
et de la vie le douloureux amour.
Parla a lungo con me la mia compagna di cose tristi, gravi, che sul cuore pesano come una pietra; viluppo di mali inestricabile, che alcuna mano, e la mia, non può sciogliere.
Un passero della casa di faccia sulla gronda posa un attimo, al sol brilla, ritorna al cielo azzurro che gli è sopra.
Oh lui, tra i beati beato! Ha l’ali, ignora la mia pena secreta, il mio dolore d’uomo giunto a un confine: alla certezza di non poter soccorrere chi s’ama.
Confins
Longuement me parle ma compagne de choses tristes, graves, qui pèsent comme une pierre sur mon cœur ; enchevêtrement inextricable de douleurs, qu’aucune main, pas plus la mienne, n’annulera.
Un moineau sur la pente de la maison d’en face un instant se pose, brille au soleil, retourne au ciel d’azur par–dessus lui.
O lui heureux bienheureux ! Des ailes il a, il ignore ma peine secrète, ma douleur d’homme venu à une limite : toute la certitude de ne pouvoir porter secours à ceux que l’on aime.
Umberto Saba1883-1957
Extrait de « Parole » (Paroles) Traduction : Bernard Simeone
Peut-être est-ce parce qu'à Trieste on était en partie italien, en partie autrichien et en partie slovène, qu'Umberto Saba est demeuré le moins connu des immortels de la poésie italienne tels que Pasolini, Ungaretti et Montale, ses contemporains et amis.
Peut-être qu'une enfance difficile, sans père, et une vie d'homme en fuite permanente pour échapper aux persécutions des "lois raciales" et préserver la vie des siens, ont conduit la parole du poète sensible et mélancolique sur le chemin discret de la simplicité plutôt que vers les buissons épais de l'hermétisme du temps.
Publié sur « Perles d’Orphée » le 28/12/2012 sous le titre ‘Je suis mort…’
Je suis mort parce que je n’ai pas le désir, Je n’ai pas le désir parce que je crois posséder, Je crois posséder parce que je n’essaye pas de donner ; Essayant de donner, on voit qu’on n’a rien, Voyant qu’on n’a rien, on essaye de se donner, Essayant de se donner, on voit qu’on n’est rien, Voyant qu’on est rien, on désire devenir, Désirant devenir, on vit.