L’herbe écoute (19) – Tarentule /3

Theraphosidae

Peu de risque, dans l’intimité des salons de musique, de se faire mordre par une tarentule, et partant, d’y surprendre quelques danseurs aux pieds nus sautillant jusqu’à la transe. Cela ne signifie nullement pourtant que la Tarentelle n’aura pas trouvé sa place dans l’atmosphère feutrée des lieux ni qu’elle y aura perdu son entrain et sa bonne humeur, en abandonnant un peu de sa mythologie.

À quoi la musique fait appel en nous, il est difficile de le savoir. Ce qui est certain, c’est qu’elle touche une zone si profonde que la folie elle-même n’y saurait pénétrer.

L’herbe écoute (14) – Papillons/IX

Thème du ballet : Une histoire de fée, de magie et d’amour. Une servante, transformée en papillon par une fée maléfique, est finalement libérée de son sort et peut épouser le prince qu’elle aime.

La « Valse du papillon », encore appelée « Valse des rayons », accompagne dans le ballet les envolées gracieuses de la ballerine. Un moment de musique pleine de légèreté, d’élégance et de vivacité, caractéristique du style d’Offenbach. Le succès de cette valse la rendra indépendante du ballet originel ; elle deviendra une pièce de concert à part entière, offrant au vers célèbre de Musset un nouvel horizon : « La valse d’un coup d’aile a détrôné la danse ». (Que l’auteur et le lecteur me pardonnent !)

– Tourbillonnons, voulez-vous ? Une valse pour effacer le temps…

Où t’envoles-tu, si frêle
Petit papillon léger ?

Massenet est depuis longtemps reconnu comme maître de l’opéra lorsqu’il écrit ces deux pièces pour piano. Sa musique ici cherche à traduire des impressions et laisse déjà entendre la transition de l’époque romantique vers l’impressionnisme cher à Debussy.

Toqué de toccata /8 – Trois mousquetaires…

On ne fera pas de Cécile une mécanique. Je suis là pour y parer. Mais il faut qu’elle soit plus habile que personne. Moi, je méprise les virtuoses ; mais je méprise les musiciens qui ne sont pas capables de virtuosité. Donc, pas d’erreur : il faut être virtuose et que ça ne se sente pas. Il faut, surtout, être virtuose sans le savoir.

Georges Duhamel –  « Le Jardin des bêtes sauvages » (1934)

Peu prisée par les compositeurs du XIXème siècle, la toccata a peu fréquenté leurs partitions. Depuis la toccata opus 7 en Ut Majeur de Robert Schumann, en 1830, le genre n’a fait que de brèves apparitions, peu signifiantes, et a dû le plus souvent laisser au « capriccio », libre et enjoué comme la toccata elle-même, le soin de défier les virtuoses.

A la fin du siècle, les compositeurs français semblent la redécouvrir, et la voici alors de retour dans des compositions délibérément exigeantes techniquement, privilégiant le caractère d’ « étude » de virtuosité.

Trois « mousquetaires » – s’ils veulent bien m’autoriser ce qualificatif – participent à la renaissance de la toccata en cette fin de XIXème siècle en France :

Cécile Chaminade en 1887 : Toccata opus 39
– Au piano Jean Dubé

Jules Massenet en 1892 : Toccata en Si Bémol Majeur
– Au piano l’inoubliable Aldo Ciccolini –

Camille Saint-Saëns en 1899 : Toccata op. 111
(Étude d’après le finale du 5ème concerto)

– Au piano un jeune Maître, Sawada Kouki

Mais, comme il se doit, trois mousquetaires, cela veut dire quatre. Et dans le rôle de ce quatrième, Paul Dukas qui, en 1901, conclut le 3ème mouvement de sa sonate en Mi Bémol Majeur par une toccata endiablée, pleine d’une fougue vivace.

Paul Dukas : Sonate en Mi Bémol Majeur – Fin du 3ème mvt.
– Au piano Hervé Billaut –

La toccata est désormais revenue.
Debussy et Ravel ne sont pas loin, en ce début de XXème siècle, qui vont en donner les plus précieux témoignages. (cf. De braises et d’Ombre)