Parlez-moi d’amour – 12 – Mélancolie hivernale

Pavel RizhenkoVillage russe

C’est au cours d’une liaison de quelques mois pendant l’année 1916 avec Ossip Mandelstam, d’un an son aîné, que Marina Tsvetaïeva écrit ce poème dont le lyrisme exprime magnifiquement la nature de leur relation : un mélange de tendresse domestique rêvée et de distance insurmontable.

… J’aimerais vivre avec vous
Dans une petite ville,
Aux éternels crépuscules,
Aux éternels carillons,
Et dans une petite auberge de campagne –
Le tintement grêle
D’une pendule ancienne – goutte à goutte de
   temps.
Et parfois, le soir, montant de quelque mansarde –
Une flûte,
Et le flutiste lui-même à la fenêtre.
Et de grandes tulipes sur les fenêtres.
Et peut-être, ne m’aimeriez-vous même pas…

Au milieu de la chambre – un énorme poêle de
   faïence,
Sur chaque carreau – une image :
Rose, cœur et navire,
Tandis qu’à l’unique fenêtre –
Il neige, neige, neige.

Vous seriez allongé tel que je vous aime : paresseux,
Indifférent, léger.
Par instants le geste sec
D’une allumette.
La cigarette brûle et se consume,
Et longuement à son extrémité,
– Courte colonne grise – tremble
La cendre.
Vous n’avez même pas le courage de la faire tomber –
Et toute la cigarette vole dans le feu.

10 décembre 1916

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Lelius

La musique et la poésie : des voies vers les êtres... Un chemin vers soi !

4 commentaires sur “Parlez-moi d’amour – 12 – Mélancolie hivernale”

    1. Lire (je parle de la poésie) doit être affaire de moments, d’occasions, de circonstances, plus rarement de choix véritables ordonnés, programmés, me semble-t-il. Combien de poètes n’a-t-on pas lus qui nous ont, par un seul vers rencontré par « hasard », laissé le plus beau des souvenirs ?

      Tout système, dans ce domaine, est une terrible entrave à la liberté, et partant, pour ma part, au plaisir…

      Aimé par 1 personne

      1. C’est très vrai ce que tu dis, d’ailleurs en ce domaine je relis tout le temps.
        Pourtant parfois je « programme » des découvertes. Le généreux père Noel m’a offert « Par les baleines » de Soline de Laveleye, je voulais découvrir cette jeune poète (la seule jeune ou pas morte publiée en poésie Gallimard depuis des lustres…) et c’est bon. J’aime aussi aller chercher et avoir des programmes en ce sens…

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