Oh ! ma France ! ô ma délaissée !
J’ai traversé Les Ponts-de-Cé.
Derrière le plus simple arrondi, incomplet certes, d’une seule lettre de l’alphabet on peut parfois trouver un émouvant poème, chargé de messages, de son siècle ou d’un autre plus lointain, poissé du sang séché des braves, qu’un inoubliable poète mu par son espérance composa un jour outragé sur les bords libres de la Loire :
« C »
Qu’un musicien à la sensibilité exacerbée se fasse complice du poète, qu’il revête sa poésie d’un habit de mélodie…
Qu’un ténor, d’une douce et ondulante inflexion, unisse ces deux voix…
Et nos âmes oublieuses franchissant les ponts de notre Loire, traverseront aussi les combats douloureux de notre histoire et les souffrances de nos ainés.
Quand les vers sont d’Aragon et la musique de Poulenc, les drames que pudiquement ils racontent paraissent plus émouvants encore.
Quand Hugues Cuénod les chante, une larme pourrait bien nous échapper… de nos temps lointains venue.
C
J’ai traversé Les Ponts-de-Cé
C’est là que tout a commencé
Une chanson des temps passés
Parle d’un chevalier blessé,
D’une rose sur la chaussée
Et d’un corsage délacé,
Du château d’un duc insensé
Et des cygnes dans les fossés,
De la prairie où vient danser
Une éternelle fiancée,
Et, j’ai bu comme un lait glacé
Le long lai des gloires faussées.
La Loire emporte mes pensées
Avec les voitures versées,
Et les armes désamorcées,
Et les larmes mal effacées,
Oh ! ma France ! ô ma délaissée !
J’ai traversé Les Ponts-de-Cé.

in Les Yeux d’Elsa – 1942

Pure merveille…
Merci Lelius
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J’aime la « mélodie française » de manière générale mais cette pièce-là est un modèle, à mon sens, de ce qu’elle produit de plus sensible.
Pour te mettre dans la confidence j’avais déjà publié ce billet, moins élaboré, en 2015.
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