Flâner entre le rêve et le poème… Ouvrir la cage aux arpèges… Se noyer dans un mot… S'évaporer dans les ciels d'un tableau… Prendre plaisir ou parfois en souffrir… Sentir et ressentir… Et puis le dire – S'enivrer de beauté pour se forcer à croire !
Des joies ; nous écoutons et nous semblons autre part.
Ils parlent de départ
Et ne partent jamais,
Ils parlent, bien qu’ils sachent,
Devenus vieux et sages,
Qu’ils sont là à jamais.
Mes pieds se cramponnent au sol
Et ma tête oscille sur mes épaules,
Quelques fois, quand, de la fenêtre ou de la porte,
Je vois les arbres osciller.
Je partirai pour quelque part,
Je ferai témérairement ce choix
Un jour où ils seront en voix
Et s’agiteront au point d’effrayer
Et de faire se sauver
Les grands nuages blancs.
Je parlerai moins qu’eux,
Mais moi je partirai.
Traduction : Roger Asselinau
Robert Frost
San-Francisco 1874 – Boston 1963
The sound of trees
Iwonder about the trees. Why do we wish to bear Forever the noise of these More than another noise So close to our dwelling place ? We suffer them by the day Till we lose all measure of pace, And fixity in our joys, And acquire a listening air. They are that that talks of going But never gets away ; And that talks no less for knowing, As it grows wiser and older, That now it means to stay. My feet tug at the floor And my head sways to my shoulder Sometimes when I watch trees sway, From the window or the door. I shall set forth for somewhere, I shall make the reckless choice Some day when they are in voice And tossing so as to scare The white clouds over them on. I shall have less to say, But I shall be gone.
Je voudrais te parler à bouche perdue
Comme on parle sans fin dans les rêves
Te parler des derniers jours à vivre
Dans la vérité tremblante de l’amour
Te parler de toi, de moi, toujours de toi
De ceux qui vont demeurer après nous
Qui ne connaîtront pas l’odeur de notre monde
Le labyrinthe de nos idées mêlées
Qui ne comprendront rien à nos songes
A nos frayeurs d’enfants égarés dans les guerres
Je voudrais te parler, ma bouche contre ta bouche
Non de ce qui survit ni de ce qui va mourir
Avec la nuit qui déjà commence en nous
De nos vieilles blessures ni de nos défaites
Mais des étés qui fleuriront nos derniers jours
J’ai tant de choses à te dire encore
Que ce ne serait pas assez long ce qui reste de mon âge
Pour raconter de notre amour les sortilèges
Je voudrais retrouver les mots de l’espoir ivre
Pour te parler de toi, de tes yeux, de tes lèvres
Et je ne trouve plus que les mots amers de la déroute
Je voudrais te parler, te parler, te parler
Albert Ayguesparse 1900-1996
Les armes de la guérison – Éditions André De Rache / 1973