Plus d’amour… Faudrait essayer !

Aimer aussi est bon : car l’amour est difficile. S’aimer, d’être humain à être humain : voilà peut-être la tâche la plus difficile qui nous soit imposée, l’extrême, la suprême épreuve et preuve, le travail en vue duquel tout autre travail n’est que préparation.

Rainer Maria Rilke – Lettre à un jeune poète

La période des vœux annuels est toujours une occasion de porter un regard ému sur la souffrance et les peines de nos contemporains, de faire même parfois quelques dons tout pleins de notre sincère compassion.
Et chaque année la fumée des cheminées écrit en grand dans le ciel d’hiver le message d’amour et de paix que chacun adresse à chaque autre.

Mais comme toutes les fumées…

Fernand PelezNid de misère – 1887

I said man is always talking ’bout it’s inhumanity to manBut what is he tryin’ to do to make it a better man?

Pour la grande Roberta Flack, chanteuse et pianiste de jazz, deux fois consécutives lauréate du Grammy Award, en 1973 et 1974.

Pour sa « pertinence sociale », son « intrépidité politique », et sa générosité.

Pour son premier disque « First Take » paru en juin 1969 chez Atlantic Records.

Grammy Hall of Fame Award décerné en 2016 par la très respectée Recording Academy

∼ Classé en 2020 parmi les 500 plus grands albums de tous les temps par le sérieux magazine international Rolling Stones.

∼ Considéré par l’immense majorité des amateurs de Jazz du monde comme l’un des 20 enregistrements indispensables à toute discothèque de qualité.

Et, à l’occasion de ce billet en particulier :
Pour le gospel, « Tryin’ Times » (Temps difficiles), qui tend, avec une rare élégance musicale, à notre légendaire et désespérant égoïsme un terrible et pourtant si beau miroir.

Tryin’times, what the world is talkin’ aboutYou got confusion all over the land, You got mother against daughter, you got father against sonYou know the whole thing is getting out of hand
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Then maybe folks wouldn’t have to sufferIf there was more love for your brotherBut these are tryin’ times,
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You got the riots in the ghetto, it’s all aroundA whole lot of things that’s wrong is going down, yes, it isI can’t understand it from my point of view‘Cause I think you should do unto othersAs you’d have them do unto you.
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Then maybe folks wouldn’t have to sufferIf there was more love for your brotherBut these are tryin’ times, yes, it is.
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I said man is always talking ’bout it’s inhumanity to manBut what is he tryin’ to do to make it a better man?Oh, just read the paper, turn on your TVYou see folks demonstrating about equality.
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But maybe folks wouldn’t have to sufferIf there was more love for your brotherBut these are tryin’ times
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Tryin’times, yeah, that’s what the world is talkin’ aboutYou got confusion all over the land

Les temps difficiles, ce dont le monde parle,
Il y a de la confusion partout dans le pays :
La mère contre la fille, le père contre le fils…
Tout nous échappe, tu sais.
Peut-être que les gens n’auraient pas à souffrir
Si on avait plus d’amour pour son prochain.
Mais les temps sont durs, oui, oui
Il y a des émeutes dans le ghetto, c’est partout.
Tout un tas de mauvaises choses se passent, oui, c’est vrai !
J’ai beaucoup de mal à l’accepter
Parce que je pense qu’il faut faire aux autres
Ce qu’on souhaiterait qu’ils nous fassent.
Alors peut-être que les gens n’auraient pas à souffrir
S’il y avait plus d’amour pour son prochain.
Mais nous vivons une époque difficile, oui, c’est vrai !
J’ai dit que l’homme parle toujours de son inhumanité envers l’homme,
Mais qu’essaie-t-il de faire pour devenir un homme meilleur ?
Oh, il suffit de lire le journal, d’allumer la télévision
Pour voir des gens manifester pour l’égalité.
Mais peut-être que les gens n’auraient pas à souffrir
Si on avait plus d’amour pour son prochain.
Mais nous vivons une époque difficile
Des temps difficiles, oui, tout le monde en parle ;
Il y a de la confusion partout dans le pays.
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‘Patauger dans l’eau…’

Wade in the Water, wade in the water children.
Wade in the Water. God’s gonna trouble the water.

Pataugez dans l’eau, pataugez dans l’eau les enfants !
Pataugez dans l’eau ! Dieu y brouillera vos traces.

Chant de reconnaissance, chant de fraternité, chant de travail aussi pour partager collectivement, au milieu des immenses plantations, courage et patience face aux humiliations et aux sévices infligés par les esclavagistes, chant spirituel également, souvent inspiré du Livre de l'Exode de l'Ancien Testament qui relate, exemple envié à imiter, la fuite du peuple hébreu opprimé par le pharaon, voilà quelques différents aspects du Negro Spiritual au XIXème siècle dans le Sud des États Unis.

Mais s'en tenir à cet inventaire serait omettre la fonction secrète du Negro Spiritual en ces temps d'extrême danger pour ces esclaves afro-américains dont le salut était réduit au seul succès de leur fuite vers le nord. Ces chants avaient acquis un rôle de code : par les choix qu'ils exerçaient, par leur manière de les interpréter, les passeurs informaient discrètement, à distance, les fugitifs de l'approche de poursuivants ou leur indiquaient des comportements à adopter pour se protéger dans certaines situations.

Ainsi par exemple, quand Harriet Tubman - surnommée "Moïse noir" tant elle a aidé de compagnons, esclaves comme elle, à retrouver la liberté, sans en perdre un seul - entonnait le mythique "Wade in the water" à leur intention sur les routes clandestines c'était pour les exhorter à abandonner les sentiers et continuer leur progression dans le lit des rivières et des ruisseaux où les chiens lâchés à leurs basques perdaient toute trace olfactive de leurs proies humaines.
Qui se serait méfié d'une "pauvre esclave noire" chantant au bord du chemin ?
Harriet Tubman 1821-1913 – statue par Wesley Wofford (détail)

Every great dream begins with a dreamer. Always remember, you have within you the strength, the patience, and the passion to reach for the stars to change the world. –

Chaque grand rêve commence par un rêveur. Rappelez-vous toujours que vous avez en vous la force, la patience et la passion d’atteindre les étoiles pour changer le monde.