Elle viendra – 17 – Attraper la fumée

Paul_CézanneL’Estaque et le Château d’If

Le regret de la Terre

Un jour quand nous dirons : “c’était le temps du soleil,
Vous souvenez- vous, il éclairait la moindre famille,
Et aussi bien la femme âgée que la jeune fille étonnée,
Il savait donner leur couleur aux objets dès qu’il se posait.
Il suivait le cheval coureur et s’arrêtait avec lui,
C’était le temps inoubliable où nous étions sur la Terre,
Où cela faisait du bruit de faire tomber quelque chose,
Nous regardions alentour avec nos yeux connaisseurs,
Nos oreilles comprenaient toutes les nuances de l’air
Et lorsque le pas de l’ami s’avançait nous le savions,
Nous ramassions aussi bien une fleur qu’un caillou poli.
Le temps où nous ne pouvions attraper la fumée,
Ah ! c’est tout ce que nos mains sauraient saisir maintenant”.

Jules Supervielle 1884-1960

 

 in Les amis inconnus – Gallimard (1934)

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Lelius

La musique et la poésie : des voies vers les êtres... Un chemin vers soi !

9 commentaires sur “Elle viendra – 17 – Attraper la fumée”

    1. Les Pyrénées étaient pour Supervielle une composante forte de son identité. Je ne sais pas si Oloron faisait partie des villes qui le concernaient directement, mais vous respirez là-bas cet air pyrénéen qui l’inspirait tant.

      Oui, sa poésie nous touche très directement. Sans doute parce que la simplicité de son expression n’entame en rien la précision des sentiments qu’elle transmet.

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    1. Merci pour ces éclaircissements ! Recueil de poèmes dont je n’ai jamais eu connaissance. Quant à sa proximité avec Oloron, votre commentaire a rafraîchi ma vieille mémoire : c’était en effet le pays de son père…

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