‘La cage’

La Cage 

Dehors, du soleil.
Ce n’est qu’un soleil
mais les hommes le regardent
et ensuite ils chantent.

Je ne sais rien du soleil.
Je sais la mélodie de l’ange
et le sermon brûlant
du dernier vent.
Je sais crier jusqu’à l’aube
quand la mort se pose nue
sur mon ombre.

Je pleure sous mon nom.
J’agite des mouchoirs dans la nuit
et des bateaux assoiffés de réalité
dansent avec moi.
Je cache des clous
pour maltraiter mes rêves malades.

Dehors, du soleil.
Je m’habille de cendres.

Alejandra Pizarnik – Argentine 1936-1972

 

Las aventuras perdidas (1958) – Œuvres (Ypsilon, 2022) 
Traduit de l’espagnol (Argentine) par Jacques Ancet.

 

 

Elle habitait un appartement minuscule au cœur de Buenos-Aires. Elle avait fait un voyage à Paris (voyage qui allait nourrir son imagination longtemps après son retour et au cours duquel elle rencontre Julio Cortazar et André Pieyre de Mandiargues, deux figures-clés dans sa vie) et par la suite elle ne sortit quasiment plus de l’espace clos de ses quatre murs, où elle écrivait, dormait (mal) et recevait ses amis. Près de son bureau, elle avait épinglé une phrase d’Artaud : «Il fallait d’abord avoir envie de vivre ».
[…]
Dans son journal, le 30 octobre 1962, après avoir cité Don Quichotte (« Mais ce qui fit le plus plaisir à Don Quichotte fut le silence merveilleux qui régnait dans toute la maison… »), elle a écrit : « Ne pas oublier de me suicider. » Le 25 septembre 1972, elle s’en est souvenue.

Alberto Manguel – extrait de sa postface dans
« Alejandra Pizarnik – Oeuvres poétiques » – Acte Sud (2005)

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Lelius

La musique et la poésie : des voies vers les êtres... Un chemin vers soi !

9 commentaires sur “‘La cage’”

        1. Petit cadeau :

          « Nous vivons ici une main sur la gorge. Que rien n’est possible, ils le savaient déjà ceux qui inventaient les pluies et tissaient des mots avec le tourment de l’absence. C’est pourquoi il y avait dans leurs prières un bruit de mains amoureuses de la brume.« 

          Adressé à André Pieyre de Mandiargues

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  1. Je la découvre. Et je tombe en amour. Merci Lelius.

    et je m’aperçois que si je ne peux plus envoyer de commentaire par iPhone je le peux sur iPad. Ce qui est un plaisir pour moi que de pouvoir choisir de réagir ou non. De n’être pas bloquée pour le faire.

    Aimé par 1 personne

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