
A l’instar de cette silhouette d’Erté, dessinateur de mode fort apprécié à la période Art-Déco, entre Paris, Broadway et Hollywood, la « Reine de la nuit » de « La Flûte Enchantée » a toujours occupé la scène debout, drapée dans de somptueuses robes, majesté hautaine aux traits durcis par l’incarnation du mal qu’elle est censée représenter, affirmant au premier regard et le dédain qu’elle nourrit pour le monde de la lumière et la supériorité du royaume des ténèbres qu’elle personnifie.
Ainsi, au cours de l’histoire de cet opéra, apparurent en scène les divas légendaires, sopranos-colorature aux voix aussi éblouissantes que leurs costumes, pour maîtriser les sommets vertigineux du rôle hystérique, plutôt modeste au demeurant, qu’ont créé Mozart et son librettiste Schikaneder.
Deux airs seulement, en effet. Mais quels airs ! Sans doute les plus difficiles du répertoire lyrique, exigeant de la voix à qui ils sont destinés une intransigeante habileté à repousser les limites du suraigu sans perdre la fluidité de la musique, la rondeur du timbre et la qualité de la diction… Pas moins !

Fallait-il qu’au festival d’Aix en Provence, en 2014, le metteur en scène britannique Simon McBurney décidât d’humaniser « La Flûte Enchantée », de sortir les personnages de leur univers mythique pour en faire, sans dévoyer la magie de l’œuvre, des êtres de notre quotidien : Tamino en jogging et baskets, les Trois Dames en treillis, Papageno en clochard, et, incroyable surprise, la Reine de la Nuit en vieille femme blafarde, cheveux en bataille, tenant à peine sur sa canne au point d’avoir besoin du secours de son fauteuil roulant pour lancer les feux de sa colère. Ne restait plus qu’à doter cette « méchante hystérique » d’un cœur sensible de mère…
Et à lui donner une voix.

Kathryn Lewek, inoubliable Reine de la Nuit
Acte I : O zittre nicht, mein lieber Sohn
(Ne tremble pas mon cher fils)
Pamina, fille de la Reine de la Nuit a été enlevée par Zarastro. Le prince Tamino, sauvé de l’attaque du serpent par les trois Dames de la Nuit et tombé amoureux de Pamina en voyant son portrait, se retrouve devant la Reine éplorée qui le charge de la délivrer. En échange elle lui promet la main de Pamina.
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Acte II : Der Hölle Rache kocht in meinem Herzen
(Ma vengeance brûle des flammes de l’enfer)
La Reine de la Nuit exige, par vengeance, que Pamina tue son ravisseur, le grand prêtre Zarastro, et lui tend le couteau fatal.
— La vengeance de l’enfer bout dans mon cœur ;
La mort et le désespoir s’enflamment autour de moi !
Si Zarastro ne ressent pas la douleur de la mort par toi,
Tu n’es plus ma fille, non plus jamais !
Que soient à jamais bannis, à jamais perdus,
À jamais détruits tous les liens de la nature
Si Zarastro n’expire pas par ton bras !
Entendez ! Entendez ! Entendez, dieux de vengeance !
Entendez le serment d’une mère !

Surprenant ! Décidément, la flûte enchantée n’en n’a pas fini d’être explorée. Quel opéra ! Pour moi, c’est l’opéra majeur.
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Surprenant, en effet, mais réussi à mon goût.
Ah ! Je ne vous rejoins pas dans le classement des opéras de Mozart. Chacun sa sensibilité, évidemment. Pour ma part, d’abord et avant tout « Don Juan »… et une grande tendresse pour « Così ».
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La flûte à été ma porte d’entrée dans le monde de l’opéra au seuil de l’âge adulte.
Je lui en garde une grande reconnaissance. En effet chacun a sa sensibilité.
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