A la mémoire de Jean H.
À la mort
Mourir, oui,
mais ne pas être agressés par la mort.
Mourir persuadés
qu’il n’y a pas de plus beau voyage.
Et en cet ultime instant être joyeux
comme quand on compte les minutes
à l’horloge de la gare
et que chacune dure un siècle.
Puisque la mort est l’épouse fidèle
qui succède à l’amante perfide
nous ne la recevrons pas comme une intruse,
ni ne fuirons avec elle.
Trop de fois nous sommes partis
sans un salut !
Au moment de dépasser
en un instant les limites du temps,
tandis que même la mémoire
de ce que nous avons été s’effacera,
permets-nous, ô Mort, de dire adieu au monde,
accorde-nous encore un délai.
Que l’immense pas
ne soit pas précipité.
À la pensée d’une mort soudaine,
mon sang se glace.
Mort, ne viens pas me saisir
mais de loin, fais-moi signe
et telle une amie, emporte-moi
comme la dernière de mes habitudes.
Vincenzo Cardarelli – Poésies / 1942
∞
En italien, dit, recueilli, par Luigi-Maria Corsanico :
Alla morte
Morire sì,
non essere aggrediti dalla morte.
Morire persuasi
che un siffatto viaggio sia il migliore.
E in quell’ultimo istante essere allegri
come quando si contano i minuti
dell’orologio della stazione
e ognuno vale un secolo.
Poi che la morte è la sposa fedele
che subentra all’amante traditrice,
non vogliamo riceverla da intrusa,
né fuggire con lei.
Troppo volte partimmo
senza commiato!
Sul punto di varcare
in un attimo il tempo,
quando pur la memoria
di noi s’involerà,
lasciaci, o Morte, dire al mondo addio,
concedici ancora un indugio.
L’immane passo non sia
precipitoso.
Al pensier della morte repentina
il sangue mi si gela.
Morte non mi ghermire
ma da lontano annùnciati
e da amica mi prendi
come l’estrema delle mie abitudini.
Vincenzo Cardarelli (1887-1959)
Superbe Et par toi et par Luigi!
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Merci pour nous deux !
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Superbe texte qui ose regarder la mort en face. Vivre, c’est peut-être aussi se préparer à mourir un jour. Nous ne sommes que des mortels comme le disaient les Anciens par oppositions aux dieux – immortels.
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Je crois profondément que la mort n’est qu’un instant de la vie. Le dernier peut-être, mais l’acte de mourir, bon gré mal gré, ne concerne que les vivants.
Quant aux dieux immortels… je vous avoue n’en avoir jamais rencontrés, moi, l’ancien. 😉
Vous souvenez-vous du début de la fable de La Fontaine « La mort et le mourant » ?
« La Mort ne surprend point le sage ;
« Il est toujours prêt à partir,
« S’étant su lui-même avertir
« Du temps où l’on se doit résoudre à ce passage. »
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Merci beaucoup, Lelius, très aimable!
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