Certains aiment la poésie
Certains –
donc pas tout le monde.
Même pas la majorité de tout le monde, au contraire.
Et sans compter les écoles, où on est bien obligé,
ainsi que les poètes eux-mêmes,
on n’arrivera pas à plus de deux sur mille.
Aiment –
mais on aime aussi le petit salé au lentilles,
on aime les compliments, et la couleur bleue,
on aime cette vieille écharpe,
on aime imposer ses vues,
on aime caresser le chien.
La poésie –
seulement qu’est-ce que ça peut bien être ?
Plus d’une réponse vacillante
fut donnée à cette question.
Et moi-même je ne sais pas, et je ne sais pas, et je m’y accroche
comme à une rampe salutaire.

in « De la mort sans exagérer »
(traduit du polonais par Piotr Kaminski)
π
Mes signes particuliers sont le ravissement et le désespoir.
C’est par ces mots que Wyslawa Szymborska avait coutume de se définir.
Poétesse polonaise discrète, à la vie simple comme sa poésie pour laquelle elle ne voulait utiliser que les mots du langage courant, « simples comme bonjour« , elle considérait que le rôle du poète doit s’en tenir à ouvrir sur la réalité telle qu’il la perçoit sans prétendre l’expliquer ou la justifier.
Dans son balancement permanent entre humour et absurde, sa poésie immédiate, inspirée par une fine observation de ses congénères, outrepasse son apparente banalité pour se poser avec une élégance caustique en miroir de cette humanité quotidienne aussi étonnante qu’affligeante.
Et pour Wyslawa refléter n’est pas juger, jamais, et jamais son propos ne vise à changer le monde. Elle l’observe d’un regard acéré certes, mais rendu bienveillant par la projection profondément pessimiste qu’elle fait sur le sort de l’homme. La douceur de sa voix ne donne que plus de force à sa conviction. « Ma foi est forte, aveugle, et sans aucun fondement ».
Cette voix sensible, indépendante, qui avait décidé de raconter la vie, tout simplement, en quelques recueils, depuis Cracovie qu’elle ne quitta pour ainsi dire pas, obtint le Prix Nobel de Littérature en 1996…
« La seule signature au bas de la vie blanche,
c’est la poésie qui la dessine.
Et toujours entre notre cœur éclaté et la cascade apparue. »
René Char…
Je ne passe pas une journée sans avoir lu un poème…
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Formidable ! Attention, si vous décidez d’augmenter la dose vous ne manquerez pas de sombrer dans l’addiction… Mais quel délicieux naufrage !!! N’est-ce pas ?
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Merci une fois encore pour cette belle découverte !
Je l’aime autant qu’elle m’est indispensable comme l’air que je respire…
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C’est à moi de vous remercier, Marie-Christine, de partager une fois de plus un de mes « petits » bonheurs. – Pas si « petits » que ça, en vérité ! La musique et la poésie me gâtent tellement… je n’arrive décidément pas à garder ce plaisir pour moi seul…
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Merci Lelius pour ce partage ! J’avais acheté « De la mort sans exagérer » quand elle avait obtenu le Nobel et je le relis régulièrement avec toujours autant de plaisir ! C’est une poète dont la langue est simple et qui dit pourtant des choses très complexes, philosophiques même.
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J’ai une immense sympathie pour son sens de la dérision.
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Oui, elle sait dédramatiser des sujets graves et nous rassurer même sur la mort …
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