Il y a comme cela des jours où la poésie nous saute à la gorge sans prévenir, sans pitié.
Que tout à coup la vie décide de nous gratifier, par surprise, sans raison, de la volupté d’un instant exquis, rare, effroyablement court, qui se résume à l’accident heureux d’une insoupçonnable et magnétique rencontre, et nous voilà victime, foudroyée mais béate, d’un tel enchantement.
L’émotion qui nous enserre soudain est inénarrable, tant les images qui la composent s’entremêlent inexplicablement dans un fugace et retentissant désordre de souvenirs, de rêves et d’espérances que l’on croyait enfouis à jamais.

Alors, comme pour dominer le silence de notre saisissement, devenons-nous spontanément poète. Instinctif mais stérile poète des vers que nous n’avons pas écrits ; ces vers émus de nos grands aînés bercés par le génie, gravés dans notre mémoire et qui dispersent sur l’éphémère d’un si fragile instant le parfum de leur éternité.
Merci, Serge, de dire mes mots ! Merci, Charles, de les avoir, hier, écrits !
Merci Madame, belle inconnue, d’avoir ce matin traversé mon chemin !
« Un éclair… puis la nuit ! – Fugitive beauté… »
A une passante
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d’une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l’ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son œil, ciel livide où germe l’ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair… puis la nuit ! – Fugitive beauté
Dont le regard m’a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l’éternité ?
Ailleurs, bien loin d’ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais !
Charles Baudelaire
Et Merci Lelius aussi, pour vos mots. Votre passante est aussi la nôtre et vient s’ajouter à « toutes ces belles passantes… »
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Je retrouve bien là, cher Claudio, votre inaltérable générosité à mon égard. Alors, merci à vous également !
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Merci pour vos mots toujours si justes pour faire naître l’émotion, et pour la voix de Serge Reggiani déclamant les mots du poète. Ce sont ces moments qui restent en mémoire lorsque l’émoi passe et nous saisit. Que tous les passants de notre vie qui ont généré en nous ce petit supplément d’âme durant un instant inoubliable, en soient remerciés. Vous en faites partie…
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Peut-on être plus aimable ? Votre message vient de rappeler à mes vieilles joues couvertes de poils qu’il y avait une autre occasion pour elles de rougir que l’effort physique et les coups de soleil. Merci de votre sympathie toujours renouvelée.
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